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immédiatement par l’oreille droite, au vent de ma pauvre cervelle. Tout ce que je sais, c’est que cet établissement s’ouvrait place Ventadour, dans le Théâtre des Italiens désaffecté et non pas rue Louis-le-Grand, comme l’assurait le poète de La Pauvreté de Rothschild, ode célèbre.

— Monsieur, me dit l’huissier à chaîne de l’administration, si vous n’avez pas audience, M. le baron ne vous recevra pas. Il est, d’ailleurs, encore plus occupé que de coutume, à cause de l’émission nouvelle. Monsieur n’ignore pas que nous lançons une nouvelle émission ?

— Mais je ne viens que pour ça. Transmettez-lui ma carte et dites-lui tout simplement que je lui apporte des nouvelles de la comtesse. Il comprendra.

— Ah ! fit-il, incertain, mais clignant de l’œil. Au bout de deux minutes, il reparut.

M. le baron va venir, mais il me prie de vous dire qu’il ne peut vous consacrer qu’un instant entre deux portes. Vous voudrez bien l’en excuser.

Et, au même moment, sous une tenture qu’il soulevait comme au théâtre, mon vieil ami Camille Saint-Saëns parut, obombré de perplexité.

— Quelle comtesse, monsieur ? Parlez vite.

Puisqu’il me donnait du : monsieur, évidemment, ce n’était pas Saint-Saëns, mais quelle ressemblance ! Et le nez y était, grand et busqué, le nez type de l’actionnaire. Il me rendit l’assurance. — C’est bien au député des Basses-Alpes que j’ai l’honneur ? — Oui, mais dépêchez-vous. Je suis en Conseil. — J’adopterai donc le langage des affaires, et même des ordres de bourse.

Et j’y allai du glouglou suivant :