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lis de temps à autre ceux de leurs fils dans la chronique mondaine du Gaulois) me manifestèrent le désir de coudoyer des lorettes authentiques. Je les menai à un bal de la Grande Chaumière. C’était un public de rapins, de filles, d’étudiants. Au milieu du bastringue, plusieurs couples dansaient le cancan à en décrocher les lustres. Nous remarquâmes surtout un petit jeune homme brun, vêtu d’une mauvaise redingote et d’un pantalon à carreaux que ne soutenait sûrement nulle bretelle. Il était bigle, avait une vilaine barbe et des cheveux poisseux comme des berlingots noirs. Les entrechats qu’il battait étaient extravagants. Ces dames se le firent nommer : Leone Gambetta.

« Quelle misère, lorsque je pense qu’il m’eût suffi alors d’abattre d’un coup de pistolet ce vilain avocat pour garantir à tout jamais ma félicité et celle de mon pays d’adoption, car, mon cher ami, je suis Français de cœur, sinon de naissance.

« Je suis né en 1829, à Varsovie, d’un père polonais et d’une mère russe, plus exactement volhynienne. C’est d’elle que je tiens mon titre d’hetman de Jitomir. Il me fut restitué par le tsar Alexandre II, sur la demande que lui en fit, lors de sa visite à Paris, mon auguste maître, l’empereur Napoléon III.

« Pour des raisons politiques, sur lesquelles on ne pourrait insister sans refaire l’histoire de la malheureuse Pologne, mon père, le comte Bielowsky, quitta Varsovie en 1830, et vint habiter