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C’est une volupté qui n’a point son égale,
D’ouvrir, au gré des vents soufflant de toutes parts,
Son âme à tous les bruits dans l’univers épars,
À toutes les rumeurs sombres ou triomphales,
Aux souffles des zéphyrs, aux souffles des rafales,
Avec leurs mille accents, éplorés ou joyeux,
Venant des profondeurs ou venant des hauts lieux,
Et d’entendre à la fois, se déroulant ensemble,
Comme deux vastes mers qu’un même lit rassemble,
Dans un hymne de gloire et de fraternité,
Les voix de la Nature et de l’Humanité !
— Aussi, vienne un des jours, trop rares dans la vie,
Où quelque ville en fête à tes chants nous convie,
Tous ceux dont l’idéal, en ce siècle moqueur,
Échauffe encor la tête et tait battre le cœur,
Tous accourent en foule, et dédaignant le monde,
Loin du théâtre obscène, où la Vénus immonde
Époumone à grands cris plus d’un vil histrion,
Assiègent ton festin, ô noble amphitryon ;
Car la table est royale, et c’est, ô maître auguste,
Le vin des forts, du vrai nectar qu’on y déguste,
Que l’on boit à longs traits, et dont l’ivresse en feu
Nous enlève à la terre et fait de l’homme un dieu !

Ô musique, pouvoir inexpliqué, mystère
Que la science en vain scrute d’un œil austère ;