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Les miasmes ont fui, balayés par son aile ;
L’air embaumé murmure, et la nuit solennelle,
Dans le ciel rajeuni, chastement dévoilé,
Guidant les matelots qui voguent sur les ondes,
Fait reluire à leurs yeux de clartés plus profondes
L’azur de son dôme étoilé.

Ainsi, quand dans l’essaim de tes neuf Symphonies,
Ô Beethoven, Orphée au front mystérieux,
L’une ou l’autre, épandant ses larges harmonies,
Gigantesque alouette, est envolée aux cieux ;
Quand l’éclatant prodige aux ailes colossales
De sa voix titanique émerveille nos salles,
Faisant vibrer sous lui, d’un vol impétueux,
L’orchestre qui déborde en bruits majestueux,
Comme à ce roi des airs les gouffres et les cimes,
L’âme humaine est à toi, l’âme et tous ses abîmes ;
L’âme humaine ! — océan plus sombre que celui
Qui bouillonne à nos yeux sous la foudre qui luit,
Plus hérissé d’écueils, plus semé de naufrages
Que l’autre dans son lit n’a de flots et d’orages !
Dans ce domaine obscur, par tous interrogé,
Nul regard plus avant que le tien n’a plongé ;
Jamais aucun sondeur n’a dans cette eau profonde,
Si loin que tu l’as fait, laissé filer la sonde ;
Nul bras, comme le tien, scruté d’un tel flambeau
Les ombres du secret gardé par le tombeau,
Que l’inflexible loi du destin qui nous mène