Page:Beltjens - À Beethoven, 1880.djvu/22

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 22 —

Les rois iront dormir le sommeil de leurs pères,
Et le bruit de leur nom chaque jour affaibli,
Sans laisser un écho, s’éteindra dans l’oubli.
— Mais toi ; tant qu’ici bas de bonheurs ou de peines
S’agiteront encor des poitrines humaines ;
Tant que le long des bois, l’ombre des soirs charmants
Prêtera son silence à de jeunes amants :
Tant qu’au pied des autels de blanches fiancées
Courberont leurs fronts purs et leurs chastes pensées ;
Tant que sur les genoux des aïeuls triomphants
Sautilleront, joyeux, de beaux groupes d’enfants ;
Tant qu’en habits de deuil des veuves désolées
Regarderont la nuit les voûtes étoilées ;
Tant que des jeunes gens les cœurs pleins de fierté
Battront pour la Justice et pour la Liberté,
Maître tu régneras ! ta majesté sans tache,
Ton fier prestige auquel nulle ombre ne s’attache,
Ton immense magie au charme si puissant,
D’âge en âge toujours iront s’agrandissant.
Grâce au progrès sacré, les sombres multitudes
S’élèveront un jour jusqu’à tes altitudes,
Et les haines d’en bas aux sinistres terreurs,
Et talions d’en haut, rancunes et fureurs,
Éteindront à la fin leurs torches insensées
Dans le Niagara de tes vastes pensées !