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Comme il songeait ! — suivant de regards idolâtres
La bergère au milieu de ses agneaux folâtres,
Et sur les verts étangs bordés de frais roseaux,
Les grands cygnes neigeux, fleurs nageantes des eaux !
Et les bruns moissonneurs à l’œil fier, dont les bustes
Dominaient les poitrails des étalons robustes,
Et sur les chars faisant ployer leurs lourds essieux.
Assises, les pieds nus, en essaims gracieux,
Les glaneuses riant parmi les gerbes blondes
De sentir les cahots des ornières profondes !
Ô champêtres douceurs, Joie immense des champs !
Près d’un humble ruisseau, sous des rameaux penchants,
Comme il oubliait tout, même son infortune,
Loin du fourmillement de la foule importune,
Heureux de fuir la ville et son brumeux séjour,
Au milieu des parfums et des splendeurs du jour !

Puis, à l’heure où le soir, envahissant les nues,
Fait naître en nous la soif des choses inconnues,
Comme il se recueillait, tout pensif, regardant
Les voiles qu’emportait le fleuve, et l’Occident,
Gigantesque bûcher plein de flamme et de cendre,
Où comme un roi mourant le jour allait descendre !

Rentré chez lui, bientôt, devant quelques amis,
Groupe vaillant et sûr, dans sa demeure admis,