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Découvrant devant lui l’immense paysage,
De bonheur et d’amour éclairait son visage !
Paradis encadré de coteaux onduleux
Que le fleuve ébloui baignait de ses flots bleus,
Ourlant dans le soleil d’un bord de pierreries,
Comme un manteau royal, leurs vertes draperies !
Molles senteurs des prés, âcres parfums des monts,
Dont l’air pur à grands flots inondait ses poumons,
Forêt, chênes touffus dont jadis les ramures
Épandaient sur son front tant de profonds murmures,
Tant de concerts d’oiseaux, et, dans l’ombre entendus,
Des bruits si doux, pour lui sans plus d’espoir perdus !
Frais viviers où glissait une brise plaintive
Qu’il semblait écouter d’une oreille attentive,
Et qu’il accompagnait, ivre de renouveau,
Des longs accords vibrant tout bas dans son cerveau !
Clairière au fond des bois, où sortaient des ravines,
Le saluant en chœur, des figures divines,
Qui, sur l’herbe imprimant leurs pas mystérieux,
Fuyaient dans la lumière en lui montrant les cieux ;
Halliers profonds, rochers muets, grottes furtives,
Riants taillis, sentiers aux mille perspectives,
Jeux de lumière et d’ombre épars sur le gazon,
Chatoyantes couleurs, grâces de l’horizon,
Oh ! comme il savourait d’une extase enivrée
Tes beautés, ô Nature, et, l’oreille sevrée
De ta voix vers laquelle il s’inclinait en vain,
Plus tendre amant, buvait ton sourire divin !