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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

de la duchesse, l’étonnement, l’épouvante, se peignaient sur le front de Charles Gruyn. Il hésita quelque temps a saisir cette main froide et à la réchauffer au feu de sa jeune et chaude haleine ; en proie lui-même à un trouble qu’il n’avait jamais ressenti, il contemplait cette merveilleuse créature dans un silencieux accablement. L’eau ruisselait alors de ses cheveux et de sa robe, une teinte violette marbrait ses bras et ses joues. Charles l’approcha du feu, il y jeta de nouveaux sarments, puis, saisissant un flacon que lui prêta le passeux, il se décida à l’approcher des lèvres de la victime.

Maître Gérard l’aidait dans tous ces soins d’un air distrait, jetant de temps à autre un regard cupide sur le coffre… Il parvint cependant avec Charles à placer la dame sur son lit ; peu à peu les joues de la duchesse se coloraient, son sein commençait à battre… En rouvrant les yeux, elle trouva près d’elle le jeune homme agenouillé…

Presque au même instant, et de l’autre côte de la cabane, une détonation soudaine, inexplicable pour Charles Gruyn, frappa son oreille et fit voler des éclats de bois noircis et fumants jusque sur lui. Il vit le passeux étendu auprès du coffre qu’il, avait voulu ouvrir, il le vit sanglant, immobile… Il était mort.


XIII

LE MASQUE BLEU.


À ce bruit terrible, aussi prompt que l’éclair, aussi mortel que la foudre, la duchesse s’était levée droite sur son séant. Charles lui montra le coffre et le passeux…

Un sang sortait du front de maître Gérard ; les parois du coffre jonchaient le sol…

En voyant ces débris, la duchesse eut l’air de se souvenir ; elle passa la main rapidement sur son front…