Page:Beaumont - Marie ou l’esclavage aux États-Unis, éd. Gosselin, 1840.djvu/384

Cette page n’a pas encore été corrigée

et enfin quelques familles de marchands auxquelles leur fréquentation du théâtre donne un assez mauvais renom dans la société américaine. Les personnes un peu distinguées par leur fortune et leur position ne vont point habituellement au théâtre ; il faut quelque chose d’extraordinaire pour les attirer ; par exemple, la présence momentanée d’un acteur célèbre ; alors tout le monde se rend au spectacle, non par goût, mais par mode. À vrai dire, personne aux États-Unis n’aime le théâtre, et presque tous ceux qu’on y voit y viennent par désœuvrement. Ils ne prêtent au spectacle aucune attention. Les Américains qui assistent, en France, à une représentation sont tout étonnés du silence qui règne parmi les spectateurs et des émotions que reçoit le public. En Amérique, l’assemblée ignore ce qu’on joue ; on cause, on discute, on remue, on prend occasion du spectacle pour boire ensemble ; l’intérêt de la pièce est entièrement perdu de vue.

La doctrine des quakers, fondateurs de la Pensylvanie, interdit formellement le théâtre ; les quakers n’étant plus en majorité ne font plus la loi ; mais une partie de leurs mœurs reste. On peut en dire autant des presbytériens de la Nouvelle-Angleterre ; on s’est écarté, à Boston, de la rigidité de leurs principes en établissant des théâtres ; mais la population n’a ni le goût ni l’habitude du spectacle. Je ne parle point ici de New-York, dont les habitants américains ne paraissent pas plus jaloux que dans les autres cités des plaisirs du théâtre. Les spectacles y sont, à la vérité, plus fréquentés ; mais il y a toujours à New-York vingt mille étrangers pour lesquels le théâtre est presque un besoin. Plusieurs théâtres pourraient prospérer à New-York sans qu’on pût en conclure que les Américains de cette ville aiment le spectacle.

PAGE 137. — * Tenir en respect des hordes d’Indiens sauvages.

L’armée des États-Unis se compose de six mille hommes, elle se recrute d’enrôlés volontaires, qui suffisent à son maintien. La population américaine y trouve l’avantage de ne point subir le recrutement forcé. Mais l’inconvénient pour le pays est d’avoir une armée composée d’hommes sans moralité, qui prennent la carrière des armes, non par patriotisme, mais par intérêt ; non comme moyen de gloire, mais comme moyen d’existence.

Ce fait, qui en lui-même est un mal, engendre, aux États-Unis, peu de fâcheuses conséquences. Comme les États-Unis n’ont point de guerres à soutenir, il n’y a dans l’armée que peu de désertions ;