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J’ai dit comment l’approche des Européens a rendu les Indiens plus misérables qu’ils n’étaient avant cette époque, en diminuant leurs ressources, avait accru leurs besoins ; mais je n’ai pu donner une idée de l’étendue des maux auxquels, de nos jours, ces infortunés sont en proie.

« Parmi les Indiens du nord-ouest particulièrement, disent MM. Clark et Cass dans leur rapport officiel, il n’y a qu’un travail excessif qui puisse fournir à l’Indien de quoi nourrir et vêtir sa famille. Des jours entiers sont employés sans succès à la chasse ; et, pendant cet intervalle, la famille du chasseur doit se nourrir de racines, d’écorces, ou périr. Beaucoup de ces Indiens meurent chaque hiver de faim. »[1]

Mais ce sont les Mémoires de Tanner[2] qu’il faut lire, si l’on veut se former une idée des horribles misères auxquelles sont exposés ces sauvages.

Les Indiens avec lesquels vit Tanner sont sans cesse sur le point de mourir de faim. Une succession de hasards soutient leur vie ; chaque hiver quelques-uns d’entre eux succombent. « Le temps était excessivement froid, dit-il en un endroit, page 227, et nos souffrances s’en accrurent. Une jeune femme mourut d’abord de faim ; bientôt après son frère fut saisi du délire qui précède ce genre de mort et succomba.

« Cet homme, dit-il plus loin, page 230, en parlant d’un Ojibbeway, partagea le sort réservé à un si grand nombre de ses compatriotes, il mourut de faim. »

Ce même Tanner nous apprend, page 288, qu’on enseigne,dès leur âge le plus tendre, aux jeunes garçons et aux jeunes

  1. Ces Indiens (les Chipeways), dit Mac-Kenney (Sketches of a Tour to the lakes) sont si imprévoyants, qu’ils passent les trois-quarts de leur vie dans le besoin, et que, chaque année, beaucoup d’entre eux meurent de faim. P. 376.
  2. Tanner est un Européen qui a été enlevé à l’âge de sept ans par les Indiens, et qui, après avoir passé trente ans au milieu d’eux, est rentré dans la vie civilisée et a écrit ses mémoires sous le titre de Tanner’s narrative. On assure que M. Ernest de Blosseville, auteur de l’ouvrage remarquable intitulé Histoire des colonies pénales de l’Angleterre dans l’Australie, doit incessamment publier un autre ouvrage fort intéressant sur les tribus indiennes de l’Amérique du Nord, et donner des extraits nombreux des Mémoires de Tanner.