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dre mère ! s’écriait-elle, je vois ton cœur déchiré… Que de pleurs… quelles alarmes !…

La fée se tut après avoir prononcé ce peu de mots, et, ayant repris sa tranquillité ordinaire : Vous aurez une fille, dit-elle au roi et à la reine ; mais je vois pour elle deux destinées bien différentes. Conçue dans le mois de Mégère, la plus méchante de nos sœurs, elle n’oubliera rien pour lui former un corps susceptible des passions les plus violentes. Les deux fées équivoques, qui succéderont à Mégère, en travaillant à mêler les humeurs qui formeront son corps, selon que leur fantaisie journalière le leur suggérera, lui donneront des dispositions à l’inégalité, au caprice qu’il sera bien difficile de vaincre. La reine est menacée d’accoucher quinze jours avant son terme : alors la princesse naîtra dans mon mois ; et je pourrai la préserver des malheurs qu’Alecto, confidente de Mégère, lui destine ; mais alors je n’aurai aucun pouvoir sur