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aller aux marionnettes, et vous le donnez à cette misérable ? Je puis me passer des marionnettes, dit Laure, et cette femme ne peut se passer de pain pour ses enfans. Vous êtes une sotte de la croire, lui dit Betsi ; peut-être a-t-elle plus d’argent que vous, et qu’elle se divertira avec votre schelling. Cela pourrait bien arriver, dit Laure ; mais, comme il se pourrait faire aussi qu’elle eût dit la vérité, j’aime mieux m’exposer à être trompée, que d’être barbare.

Le gentilhomme écoutait cela avec attention, et il dit aux deux sœurs : Ne disputez plus, mes belles filles, voilà chacune quatre guinées ; vous pourrez aller aux marionnettes, tant que vous voudrez. Je vous suis bien obligée, dit Laure en faisant une grande révérence ; cependant, comme je n’ai pas besoin d’argent, permettez-moi de ne pas prendre le vôtre ; une fille sage ne doit jamais rien recevoir des hommes : si pourtant vous avez tant d’envie de me faire un présent, parce que