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l’œil de la servante et celui de la maîtresse ; j’en fus instruite à mes dépens. Enhardie par mes premiers succès, je retournai le lendemain dans cette chambre fatale ; et le premier objet qui s’offrit à ma vue, fut une machine grillée dans laquelle il y avait un morceau de lard rôti. Attirée par l’odeur, j’entre, je saisis ma proie ; mais, ô malheur, que plusieurs années n’ont pu effacer de ma mémoire ! À peine eus-je touché le morceau fatal, que la porte de cette machine infernale se ferma sur moi avec un bruit épouvantable, et m’ôta tout espoir de salut. Combien de fois alors ne maudis-je pas ma gourmandise ? Quelles résolutions ne pris-je pas pour l’avenir, si j’avais le bonheur d’échapper à ce danger ! Je n’eus pas le tems de faire de longues réflexions : le bruit qu’avait fait la souricière en tombant, attira la maîtresse et j’entendis sortir de sa bouche le terrible arrêt de ma mort ! Je fus condamnée à être noyée, et une femme-de-chambre