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pauvres, et n’avait aucune complaisance pour les autres. Elle n’aimait pas non plus à travailler, crainte de gâter ses mains, et elle n’allait jamais dans les champs que quand son père le lui avait commandé vingt fois, parce qu’elle disait que cela lui hâlerait le teint. Sa cadette, Laure, avait été fort jolie avant la petite vérole ; mais cette maladie l’avait gâtée sans l’affliger, parce qu’elle n’était pas attachée à sa beauté. Elle était aimée de tout le voisinage, parce qu’elle cherchait a obliger tout le monde ; et, bien souvent, elle s’ôtait le pain de la bouche pour le donner aux pauvres. Quoique sa sœur aînée ne l’aimât point, elle cherchait toutes les occasions de lui faire plaisir, et se chargeait volontiers de tout l’ouvrage de la maison, pour lui en épargner la peine.

Un jour que les deux sœurs étaient occupées à traire les vaches, un gentilhomme qui était fort riche, passa par-là, et fut charmé de la beauté de l’aînée. Il