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corder son cœur avec son devoir ; qu’elle aimait son mari et qu’ainsi elle le croyait trop honnête homme pour essayer de troubler leur union.

La Noix n’avait garde de soupçonner son père d’être l’auteur de cette lettre ; aussi n’eut-il pas le moindre doute de l’infidélité de sa maîtresse ; il crut être absolument guéri de son amour pour elle ; et, dans son désespoir, il crut ne pouvoir mieux se venger, qu’en s’attachant à son épouse d’une manière indissoluble. Il fut la dupe de son dépit, et bientôt il sentît qu’il aimait son ingrate plus que jamais. Quelques jours après, il reçut une seconde lettre par un inconnu ; Marianne lui apprenait qu’on l’avait forcée, le poignard à la main, d’écrire la première lettre, et l’assurait qu’elle se conservait toute entière pour lui. Quel coup de foudre pour cet amant !

Les choses en étaient à un point où madame de la Noix ne pouvait plus que plaindre son époux, qui tomba dans une