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vait, en pareil cas, troubler la fête.

On coucha la mariée ; et son époux, s’étant enfermé dans la chambre nuptiale, vint galamment s’asseoir auprès de son lit. Là, renversé dans un fauteuil, la tête dans ses deux mains, il se mit à rêver aussi profondément que s’il eût été seul. Son épouse, après lui avoir laissé tout le tems de faire ses réflexions, rompit enfin le silence : Vous m’avez trompé, monsieur, lui dit-elle, lorsque vous avez feint une fausse délicatesse, sur une inclination que je n’ai pas balancé à sacrifier à mon devoir ; je le sens, vous aimez, et vous me regardez actuellement comme la cause de vos malheurs : mais, monsieur, ne pourrais-je pas les adoucir ? Je vous laisse à vous même ; oubliez que les lois m’ont fait votre épouse, et me regardez comme une amie dans le sein de laquelle vous pouvez en sûreté répandre vos douleurs ; ouvrez-moi votre cœur ; exigez tout ce que vous croirez nécessaire pour votre bonheur, et soyez persuadé que je me prêterai