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il lui dit de se tenir prêt pour aller à quelques lieues d’Auxerre, visiter un de ses amis. Ce ne fut qu’au moment du départ, qu’il instruisit le jeune la Noix du motif de cette visite. Je vous ai marié, lui dit-il : la fille est aimable, jeune et riche ; ainsi je m’attends à vos actions de grâces.

Notre jeune homme était bien éloigné de cette disposition ; il se jette aux pieds de son père, le conjure de ne pas faire le malheur de sa vie, en l’unissant à une personne qui, toute aimable qu’il la supposait, ne pourrait rien sur son cœur. Prévenu de la passion la plus vive qui se puisse concevoir, il pleura, il menaça de se laisser mourir de faim ; mais il avait affaire à un père inflexible et rusé. Il ne tient qu’à vous de me désobéir, lui dit ce vieillard obstiné ; mais votre maîtresse en sera la victime ; et tout de suite il lui montre la lettre de cachet qu’il avait obtenue, pour faire enfermer Marianne.

Le jeune homme étourdi d’un coup si peu attendu, ne vit que le péril où était