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pouser ? répondez, aimable Angélique.

Angélique resta quelque tems sans répondre. Elle parut agitée ; mais, reprenant bientôt la parole : non, dit-elle, je n’y consentirai pas ; et ce serait mal payer les sentimens que vous avez pour moi, que d’accepter une proposition que votre passion seule vous engage à me faire.

Cette passion ne durera pas toujours ; je sais ce que vous êtes, et ce que je suis. Sans naissance et sans biens, vous vous repentiriez bientôt de m’avoir donné la main, et je serais la plus malheureuse des femmes.

Bannissez cette crainte, répartit de Clerville, elle m’est injurieuse : je vous aime, vous me flattez de quelque retour, nous ne pouvons qu’être heureux ensemble. La naissance illustre et les grands biens ne font pas la félicité. Ces biens sont étrangers à l’homme ; vous en avez qui sont uniquement à vous, et dont je fais beaucoup plus de cas. Votre vertu,