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je me sens assez de forcé pour ne vous jamais voir, si vous manquez à la retenue que j’exige de vous. Clerville, après l’avoir assurée qu’elle n’avait rien à craindre lui dit tout ce que peut inspirer l’amour le plus vif et le plus tendre, et, enfin, se retira.

En chemin, il fit réflexion suc les mouvemens de son cœur, et les effets qu’il pouvait avoir ; il trembla, en songeant jusqu’où cette passion pouvait le conduire.

Angélique a de l’esprit, disait-il, elle a de la vertu, ou feint d’en avoir assez pour m’ôter toute espérance d’être heureux ; je l’aime, et je suis capable de tout.

Ces idées l’occupèrent jusqu’au château ; les réflexions vinrent au secours ; il résolut de ne la plus voir. Cependant, la raison, en lui-montrant ce qu’il avait à craindre de cet engagement, ne lui laissait pas assez de force pour surmonter sa passion.

Il fut quelques jours sans aller voir