Page:Beaumont - Contes moraux, tome 2, Barba, 1806.djvu/194

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(190)

le dépeindre, acheta une fort belle terre contiguë d’une des siennes ; il fit cette acquisition à la sollicitation d’un de ses fermiers, nommé Boissart, homme de probité.

Bientôt l’envie d’embellir cette terre se fit sentir au marquis, et, quoiqu’il ne pensât pas à l’habiter, les mains lui brûlaient d’y faire travailler. (Il faut un objet à l’homme, et cette terre en devint un pour lui, faute d’autre). Un jour qu’il était chez Boissart, il y vit une jeune personne extrêmement jolie ; il demanda avec empressement qui elle était ; le fermier lui dit que c’était sa fille qu’il faisait élever au couvent. Comme ce n’est pas l’usage des gens de campagne, Clerville demanda pourquoi il ne gardait pas sa fille auprès de lui pour soulager sa mère.

C’est, répondit Boissart, parce que je n’ai d’autre but que de faire son bonheur. Je voudrais qu’Angélique pût se résoudre à se faire religieuse. Ne croyez pas, ajouta-t-il, que ce soit dans la vue