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tirée de cette situation que par une autre plus pénible. Tout-à-coup, l’image de son père et de sa mère mourant de douleur et de désespoir s’offre à ses yeux. Ils l’accusent de leur mort, lui rappellent la tendresse qu’ils lui ont toujours témoignée, et la triste récompense qu’ils en ont reçue. À l’instant, elle tombe contre terre, leur demande pardon avec de grands cris, leur tend les bras et il lui semble qu’ils la repoussent avec horreur. Ses parens, ses amis, tous ceux qu’elle a connus, semblent aussi se joindre à eux. Les uns lui reprochent l’infamie dont elle a couvert tous ceux qui ont le malheur de lui être liés par le sang : les autres se reprochent les égards qu’ils ont eus pour une créature qui les méritait si peu ; les derniers insultent à son malheur, se réjouissent de la voir humiliée, lui reprochent sa hauteur, sa vanité, la félicitent ironiquement sur la haute alliance qu’elle a contractée. L’ame de la pauvre Henriette ne put supporter tant d’assauts : elle s’éva-