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À peine Henriette fut elle seule, qu’elle se rappela tout ce qui lui était arrivé, comme un songe dont elle n’aurait pu constater la réalité, si l’état déplorable, dans lequel elle était réduite, ne l’eût forcée de s’avouer l’existence de son désordre et de ses suites. Alors, comme si elle eût appris dans ce moment tout ce qui s’était passé, elle se sentit saisie d’une si grande confusion que, quittant avec précipitation la place qu’elle occupait, elle courut se cacher dans un recoin obscur où, se pressant contre la muraille, elle semblait vouloir s’y enfoncer pour se dérober à elle-même sa propre vue ; vain effort, toutes les funestes démarches qui l’avaient conduites à sa ruine, étaient rangées devant ses yeux : c’était comme un cercle d’ennemis rangés en bataille autour d’elle, qui la pressaient et l’environnaient de telle sorte qu’ils ne lui laissaient aucune issue pour s’échapper ; elle n’osait ni lever les yeux, ni respirer, ni faire le moindre mouvement. Elle ne fut