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vre en Allemagne, et de ne l’abandonner qu’au moment où des vœux le forceront à renoncer à toute espérance. Vous voyez, mademoiselle, ajouta le faux comte, que l’honneur ne me permet pas d’abandonner mon ami dans une occasion si dangereuse. Il faut que je vous quitte ; et, ce qui met le comble à mon désespoir, c’est que je ne puis me promettre de vous revoir avant six mois, qui me paraîtront six siècles ; mais, si vous daignez partager mon amour, je jure de revenir aussitôt que mon ami se sera fixé, et de vous faire, dans ma patrie, un sort digne de vous.

La Benoît frémit en apprenant la résolution du comte. Mille accidens pouvaient déranger un établissement dont elle était éblouie. Quelque bonne opinion qu’elle eût de ses charmes, elle craignait tout d’une si longue absence ; un nouvel objet, un retour sur ce qu’il devait à la noblesse de son sang, pouvaient lui faire perdre le comte. Elle resta quelque tems rêveuse ; puis, reprenant la parole, elle dit à son