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naché : elle l’arme de toutes pièces. Mascave admire avec plaisir ces nouveaux ornemens : un carquois rempli de flèches, attire sur-tout ses regards : il examine le carquois, et tire une flèche ; il essaie sur le bout de son doigt, et se pique sans le vouloir. Cette flèche était celle que lui gardait l’amour. Les sentimens qu’il avait pour Rannée se dévoilent, se fortifient, ou plutôt changent de nature. Les tourmens de l’absence redoublent : il dit à Clio en soupirant : madame, que faisons-nous ? pourquoi nous éloigner de Rannée ? Ah ! je n’ai jamais connu, comme je le sais à présent, le bonheur de vivre avec elle : en serai-je privé pour jamais ?

Ainsi, l’amour, devenu passion, s’annonce par des tourmens : le soupir, enfant de la douleur, est le premier effet qu’il produit ; l’inquiétude suit, la défiance, la crainte, et mille mouvemens fâcheux que l’amour vertueux ignore. Clio sourit, et, embrassant Mascave, lui dit : mon fils, cette absence ne sera point