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dégoûter d’une chose qu’on était parvenu à lui faire aimer, à moins qu’on ne lui prouvât qu’il avait eu tort de s’y attacher.

Ces différences de tempérament lui inspirèrent bientôt de l’éloignement pour Rannée : il ne pouvait se prêter à sa bizarrerie. Quoique la princesse n’eût que cinq ans, elle s’aperçut bientôt que Mascave la fuyait, et s’ennuyait avec elle. Elle l’aimait avec tant de vivacité, que cette froideur la jeta dans une sorte de désespoir. Elle versait un jour des larmes amères dans un lieu écarté. Qu’avez-vous, ma chère, lui demanda Clio, qui la surprit en cette situation ? Je suis désespérée, ma bonne, lui répondit-elle ; Mascave ne m’aime plus. Je n’en suis pas surprise, lui répondit Clio, Mascave a trop de raison pour aimer ce qui n’est point aimable. Est-ce que je ne suis pas aimable, lui répondit la princesse avec vivacité ? J’ai beau regarder au miroir, je ne trouve rien ici de plus beau que moi,