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il avait trois ans plus que Rannée, Clio ne le quittait pas une minute. Nul de ses mouvemens n’échappait à la fée ; nulle de ses actions dont elle ne tirât avantage pour connaître et perfectionner ses dispositions naturelles. Mascave répondait à ses vues, excepté en celle qu’elle avait le plus à cœur. Il regardait Rannée comme une sœur chérie ; mais ses sentimens venaient de l’habitude de la voir. Clio n’y voyait point cette vivacité qu’elle remarquait dans ceux de la princesse. Clio fut alarmée de cette indifférence, et n’oublia rien pour la faire disparaître ; tout fut inutile ; et plus d’une fois elle fut tentée d’accuser l’Amour de n’avoir rempli que la moitié de ses promesses. C’était pourtant pour les accomplir plus clairement qu’il en retardait l’exécution ; mais Clio, quoique fée, était mortelle. Ses vues étaient trop bornées pour comprendre la sagesse des dispositions des dieux qui vont à leur but par les routes qui paraissent en éloigner.