Page:Beaumont - Contes moraux, tome 2, Barba, 1806.djvu/114

Cette page a été validée par deux contributeurs.
(110)

deur. Elle comptait sur les talens des femmes de Lutésie : la nature les faisait naître fées, lorsqu’il s’agissait d’inventer des modes capables de cacher quelques années. Nul défaut qui n’eût un remède dans la disposition du corps de baleine, du panier, dans l’arrangement des cheveux, des rubans et des mouches. Les marchands de la capitale vendaient du teint, de l’embonpoint ; les maîtres à danser, des grâces ou quelqu’autre chose qui y ressemblait si fort, qu’on s’y méprenait souvent. Tous leurs talens furent employés pour dérober aux yeux de l’Amour une vingtaine des années d’Alecto, qui mit, à la place de la pudeur et de l’ingénuité de la jeunesse un air coquet, hardi, indécent. Elle présentait une gorge soutenue par artifice, qu’elle n’avait pas couverte du voile le moins épais. Elle étudia, devant son miroir, les regards les plus séduisans ; et, comme elle se trouvait encore fort aimable, elle ne douta pas un moment de l’effet de ses charmes, ou plu-