Page:Bazin - La Barrière, Calmann-Lévy.djvu/227

Cette page n’a pas encore été corrigée

de deux cent trente. On ne chantait pas. Mais deux cent trente âmes humaines étaient absorbées dans la contemplation du même objet. Elles le désignaient invinciblement, plus impérieusement que si elles eussent crié son nom, par la puissance unanime des pensées qui s’échappaient d’elles, et qui se rassemblaient au-dessus de l’autel, flèches vivantes dirigées toutes ensemble vers l’heure éternelle.

Cette force mystérieuse, qui sort des foules attentives, incline comme le vent ; elle fait frissonner ; elle ébranle ; elle sollicite au mouvement. Félicien, moins que Réginald, avait besoin d’être porté par ce courant. Des souvenirs, une sorte de regret et de défi tout ensemble, le firent regarder l’ostensoir, et dans l’ostensoir, l’hostie. Il assura sur elle son regard déshabitué, et qui ne demandait rien, qui poursuivait seulement une expérience, et il eut le sentiment, la certitude, que rien en lui n’avait remué, et que cette rencontre, depuis quelque temps évitée, le laissait insensible. Il eut la douleur de n’être pas ému. Il songea, regardant cette hostie blanche dans les rayons d’or : « Marie ne sait pas que je suis ici ; mais je