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AILLI.

junctionem apparuisse in cœlis. Atqui falsissimum est quod sibi sumit de anno vel diluvii vel natalis Domini : nec levis est error, sed spississimus ; in priori quidem numero annorum penè sexcentorum, in altero autem paulò pauciorum[1]. Quid mirum ? Omninò Cameracensis fuit Chronologiæ imperitissimus, ut vel arguit quòd Arrianam hæresim cœpisse dicat anno Christi septingentesimo, quàm verisimiliùs tùm penè exstinctam dixisset. Ortam verò constat ferè initio sæculi quarti[2]. Si Thevet eût écrit avec jugement, aurait-il parlé de Pierre d’Ailli en ces termes ? « Je désirerois que tous ceux qui se meslent d’astrologiser daignassent un peu mettre le nez avant dans ses livres : ils n’y perdroient leurs peines ; car, outre les singulières observations que je viens de ramentevoir [3], ils y trouveroient la sentence minutée à l’encontre de ceux qui, sous le nom de la vraye astrologie, prennent plaisir de s’embéguiner du faux masque d’astrologie, introduisans une idolâtrie des astres du tout abominable[4]. « Cette prétendue idolâtrie n’était pas plus à craindre au temps de Thevet, que le culte religieux de la terre ; de sorte que, si les livres de Pierre d’Ailli n’étaient bons qu’à convertir cette sorte d’idolâtres, on n’avait presque point à faire d’eux. Mais comme d’autre côté ils étaient propres à entretenir le crédit de l’astrologie, par les vertus que cet auteur attribue aux conjonctions des planètes, choses dont Thevet ne dit pas un mot, leur lecture était infiniment plus préjudiciable que profitable.

(G) Qui condamna Jean Hus au supplice. ] Ce ne fut point sans l’exhorter à se soumettre, et sans lui déclarer que c’était le meilleur parti à prendre : Examinatis dictis testium, et recitatis articulis erroneis in Patrum consessu, cardinalis Cameracensis, judex causæ deputatus à Concilio, dixit ad Joannem Huss : « En viæ duæ propositæ sunt tibi, ut ex his eligas unam : aut te offeras omninò totum in potestatem et gratiam Concilii, ejusque decretis super hâc re acquiescas ; ita namque fiet ut Concilium ob honorem Domini nostri Regis Romanorum nunc præsentis ac fratris ejus Bohemiæ Regis, clementer acturum sit tecum ; aut si ex dictis articulis quosdam tenere ac defendere intendas, et desideres aliam audientiam, concedetur tibi quidem ; sed tunc scias hìc esse magnos et illuminatos viros qui fortissima habent adversùs articulos tuos fundamenta, et verendum est ne indè gravioribus involvaris erroribus. Id consulendo dixerim tibi, non ut judex[5]. » M. de Launoi, ayant rapporté cela, ajoute que cet hérétique aima mieux soutenir opiniâtrement ses opinions et être brûlé, que suivre le conseil salutaire du cardinal d’Ailli : Verùm litigiosus homo dogmata sua nimìs pertinaciter propugnare maluit et comburi, quàm usque adeò salubre cardinalis Alliaci consilium sequi.

(H) Il paraît dans le Catalogue des témoins de la vérité. ] « Par la détermination du concile de l’Église françoise, il fut délégué pour dénoncer aux deux papes, qui s’entrequerelloient pour la papauté, qu’ils se démissent du siége papal. Pour response, lui fut dit que les papes de Rome sont exempts de toute tache de schisme ; mais que c’estoient les prélats françois, qui de gayeté de cœur schismatisoient. Pour cette occasion, il fut depuis renvoyé, suivant l’avis du concile tenu à Paris, avec le sieur Jean Maingre, maréchal de Boucicaud, lequel par après estrilla bien l’antipape à Avignon, comme aussi le cardinal d’Ailli lui lava la tête du long et du large[6]. Et c’est ce que Henri Pantaléon semble le coucher au roolle de ceux qui en cette saison crièrent et de voix et d’escrits contre l’ambition des papes, corruption de l’Église, schismes et divisions qui lors pulluloient grande-

  1. Vossius, dans son hypothèse, a dû trouver ici une erreur de plus de six cents ans.
  2. Vossius, de Scientiis Mathemat., p. 215.
  3. Il n’avait parlé que de la réduction de tous les parallèles de Ptolomée à douze.
  4. Thevet, Histoire des Hommes illustres, tom. VII, p. 89.
  5. Launoii Hist. Gymnasii Navarræ, p. 474, ex Hussitæ cujusdam Relatione, apud Bzovium, ad ann. 1415, num. 47.
  6. Voyez ce que du Plessis-Mornay cite de Froissard, sur cette matière, dans son Mystère d’Iniquité, pag. 486, et suiv. Édition de Saumur, en 1611, in-folio.