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ACINDYNUS.

Six ans après on le poussa encore plus vivement, parce que Jean Cantacuzène, qui était devenu empereur, aimait Palamas. Les censures et les excommunications qui tombèrent à diverses fois sur la tête d’Acindynus, le réduisirent enfin à une vie plus tranquille et tout-à-fait obscure. Jacques Gretser, jésuite allemand, publia à Ingolstad, en l’année 1616, les deux livres d’Acindynus, De essentiâ et operatione Dei. Léon d’Allazzi a publié un poëme[a] et quelques fragmens de ce même auteur[b], qui, ayant eu la destinée de passer pour hérétique assez long-temps (A), a trouvé enfin des juges plus éclairés et plus équitables (B).

  1. Græc. Orthod. tom. I, à pag. 756, ad 770.
  2. In lib. II, cap. XVI, de Consensu, etc. apud Appendic. Cave, Hist. Liter. Script. Eccles. pag. 34. Consultez cet Appendix, touchant cet article-ci.

(A) De passer pour hérétique assez long-temps. ] Comme dans la chaleur de la dispute on ne songe qu’à presser son adversaire, on ne s’éblouit que trop souvent à un tel point, qu’on ne s’aperçoit pas que l’on passe d’une extrémité à l’autre, ou qu’au moins on pousse ses raisons si loin, qu’elles prouvent trop. Je ne doute point que Barlaam et Acindynus n’aient par là donné prise à leur adversaire Palamas, et qu’étant orthodoxes dans le fond, ils n’aient quelquefois raisonné en hérétiques. Pratéolus n’a pas manqué de les placer dans son catalogue ; mais il est impossible de rien comprendre dans l’arrêt de leur condamnation, tel qu’il le rapporte. Ce qu’il y a de moins obscur dans son livre, à l’égard de Barlaam et d’Acindynus, est que le concile qui fut convoqué pour les condamner fut célébré en présence du bienheureux et trés-célèbre empereur Michel Andronic Paléologue, et de Jean son fils, sous Henri VII, empereur d’Allemagne, et le pape Jean XXII, environ l’an 1313 de Jésus-Christ [1]. Tout cela fourmille de fautes, car, 1°. dans le siècle[2] dont il s’agit ici il n’y a point d’autre empereur de Constantinople qui puisse être traité de bienheureux par un catholique romain que Michel Paléologue. Il se réunit avec le saint siége, et il mourut dans cette union. Or il ne se nomme pas Michel Andronic ; il n’eut point de fils nommé Jean, et il mourut l’an 1283. En second lieu, l’empereur dont le fils se nomme Jean ne se nomme qu’Andronic Paléologue, ne commença de régner qu’en 1328, et n’eut point pour contemporains Henri VII et Jean XXII. Enfin, il est faux qu’Acindynus ait été condamné environ l’an 1313. Le père Gaultier n’oublie point dans ses tables chronologiques Barlaam et Acindynus : il les loge au quartier des hérétiques, et cela sur le témoignage de Pratéolus.

(B) A trouvé enfin des juges plus équitables. ] Voyez les auteurs cités par M. Moréri : je veux dire Pontanus sur Cantacuzène, et les Annales de M. de Sponde. Voyez aussi celles de Bzovius, le père Gretser[3], le père Maimbourg[4], et les auteurs qu’il cite dans l’ouvrage indiqué à la marge.

  1. Prateoli Elench. Hæret. pag. 86, edit. Colon. ann. 1605, in-4.
  2. On prend ici ce mot en général pour l’espace de cent années, à les commencer où l’on veut.
  3. Gretseri Notæ in Cantacuzenum, et in editione Acindyni.
  4. Maimbourg, Hist. du Schisme des Grecs, liv. V.

ACINDYNUS (Septimius) fut consul de Rome avec Valérius Proculus, l’année que Constantin, fils du grand Constantin, fut tué auprès d’Aquilée[a]. Il avait été gouverneur d’Antioche, et il arriva une chose sous son gouvernement qui mérite d’être rapportée. Saint Augustin en fait le récit[b]. Un certain homme ne portant pas à l’épargne la livre d’or à laquelle il avait été taxé, fut mis en prison par Acindynus, qui lui jura qu’il le ferait pendre

  1. En 340, selon Calvisius.
  2. August. de Sermone Domini in monte, lib. I, cap. XVI.