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ACAMAS

fond fort différente (A). Erpénius n’a point entendu les paroles d’Elmacin sur ce sujet-là (B). Ce que je viens de dire[a] et les deux remarques que l’on va voir sont des choses dont je ne me rends point garant : je les rapporte sur la foi d’autrui. Il n’y a de moi là-dedans que le parallèle du spinozisme, et je ne suis pas trop persuadé que celui qui critique Erpénius entende mieux que lui l’endroit en question.

  1. Tiré d’Elmacini Histor. Sarracen., lib. II, cap. I, et seq.

(A) D’une secte dont celle de Spinoza n’est pas fort différente. ] La secte dont Abumuslimus faisait profession enseignait une sorte de métempsycose qui n’était guère semblable à celle de Pythagoras[1]. Celle-ci ne détruisait point les âmes ; elle ne faisait que les envoyer d’un corps à un autre corps : mais l’autre métempsycose est ainsi décrite par le fameux voyageur Pietro della Valle, dans l’endroit où il fait mention de certains hérétiques mahométans qui s’appellent Ehl Eltahkik, hommes de vérité, gens de certitude. « Ils croient, dit-il[2], qu’il n’y a point d’autre dieu que les quatre élémens... ; qu’il n’y a point d’âme raisonnable ni d’autre vie après celle-ci ; mais que tout homme n’est qu’un mélange des quatre élémens dont l’homme est composé pendant sa vie, conjoints ensemble et animés par cette étroite union qui les tient liés les uns aux autres, et qui, en mourant, se résout et se dissipe dans les quatre élémens simples, et par conséquent s’en retourne à Dieu, duquel il a été créé ; et ainsi de toutes les autres choses qui sont sur la terre et dans le ciel : en un mot, qu’il n’y a pour tout que les quatre élémens, qui sont Dieu, qui sont l’homme, et qui sont toutes choses ; et que, par conséquent, les quatre élémens sont éternels, et le monde, avec toutes ses vicissitudes et changemens, éternel. » Quelque différence qu’il y ait entre ce dogme et le système de Spinoza, le fond est toujours le même : on tient de côté et d’autre que l’univers n’est qu’une seule substance, et que tout ce qu’on appelle générations et corruptions, mort et vie, n’est qu’une certaine combinaison ou dissolution de modes. Elmacin appelle métempsycose de résolution celle qu’Abumuslimus croyait.

(B) Erpénius n’a point entendu les paroles d’Elmacin sur ce sujet-là. ] Il lui fait dire qu’Abumuslimus suivit la secte de la succession descendante, profitebatur sectam successionis descendentis [3]. Il fallait dire qu’il suivait la secte qui enseignait la métempsycose de résolution, profitebatur sectam eorum qui credunt metempsycosim resolutionis. C’est ainsi que le sieur Bespier a censuré et corrige la traduction d’Erpénius en cet endroit-là.[4].

  1. Bespier, Remarques sur l’état présent de l’Empire Ottoman, par Ricaut, pag. 665.
  2. Pietro della Valle, tom. III, pag. 392, cité par Bespier, là même.
  3. Elmac. Histor. Sarrac., lib. II, cap. III, pag. 100.
  4. Bespier, Remarq. sur l’état présent de l’Empire Ottoman, par Ricaut, pag. 665.

ACACIA ou ACAKIA (Martin). Cherchez Akakia.


ACAMAS, fils de Thésée[a], suivit les autres princes grecs au siège de Troie. Il fut député aux Troyens avec Diomède pour redemander Hélène. Cette ambassade fut inutile quant au dessein principal, mais elle valut à Acamas ce qu’on appelle bonne fortune en fait de galanterie. Laodice, fille de Priam, devint si amoureuse de lui, qu’ayant appelé en vain à son secours l’honneur et la honte, elle fut contrainte d’ouvrir son cœur à Philobie, femme de Persée, et de lui demander assistance pour un des plus pressans besoins où l’on se pût rencontrer[b]. Philobie, touchée de compassion, pria son mari de faire que Laodice pût

  1. Pausanias, lib. I, pag. 5, et lib. X, pag. 325 et 343.
  2. Παρακαλείν τε αὑτήν όσον οὐκ ἤδη