contre lui, et qui eussent souhaité qu’il en demandât justice à messieurs du châtelet ; car on ne se contenta pas de l’accuser d’ignorance et d’un vain amusement à des anagrammes et à de mauvaises pointes : la justice ne se mêle point de ces sortes de procès, nihil hæc ad edictuni prœtoris : on l’accusa aussi d’être bâtard et meurtrier, comme on l’a vu ci-dessus [1] : et voici un passage qui l’accuse d’avoir été un faussaire et un sodomite :
Jadis dans un fameux procès,
Dont il eut un honteux succès,
Il appela d’une sentence,
Qui n’épargnait que la potence,
Quand de tout point il eut été
Convaincu d’une fausseté :
Car il imitait de nature
Toute sorte de signature,
Et gagna tout en jugement
Quand il ne tint qu’à son serment.
Il eut d’autres vices encore
Que je tairai, car je l’honore.
L’on dit que son valet un jour
L’accusa de la sale amour,
Imputant à ce parasite
Le crime d’être sodomite [2],
Cela passe la raillerie : on est responsable
d’une telle accusation au
tribunal criminel. L’actio injuriarum
a lieu en cette rencontre [3], et l’accusé
peut avoir recours à la loi du
code Si quis famosum, selon laquelle
un diffamateur qui ne produit point
de preuves valables doit être puni
comme un calomniateur.
(L) Il logeait au collége de Boncour, et cela fournit une matière de plaisanterie. ] Prouvons ce fait par ces paroles de M. Ménage :
Quà collis, Genova, tuus supereminet urbem,
Stat Becodina domus, docti celeberrima quondàm
Atria Gallandi, summo rectore juventæ.
.........................
Illic exiguo conduxerat ære penates Gargilius [4].
et par ces beaux vers de Féramus :
Quà posuit stabiles Parisina academia sedes,
In monte excelso, mons eminet altior. Illìc
Exiguâ parvos habitat mercede penates.
Non illùc studia, et docti vicinia Phœbi
Pellexêre hominem sed ut hinc toti incubet urbi,
Majoresque alto speculetur vertice fumos,
In tua jejunus ruiturus prandia, MEMMI,
Vel famosa tuæ, BONELLI, fercula mensæ,
Seu vestras, HANEQUINE, dapes tantâ arte paratas,
Et quicumque alii mensâ præstatis opimâ
Luculli illustres, Mæcenatesque beati [5].
Vous voyez que l’on prétend qu’il ne
se logea dans ce collége qu’afin de
mieux découvrir la fumée des cuisines
de Paris, car c’était le lieu le
plus haut de toute la ville. Mais s’il
était commode par cette raison, il
était incommode par sa trop grande
distance des maisons où le parasite
trouvait à dîner. Cela fit qu’il fut
contraint de se pourvoir d’un cheval.
Voyons là-dessus les plaisanteries
de M. Ménage. Verùm cùm summo
in cacumine montis Genovefani
tunc temporis habitaret, ut hinc scilicet
culinarum fumos, ex quibus auguria
captabat, commodiùs prospicere
posset ; atque adeò horum omnium
quos assiduè colebat, ab ejus tugurio
domus longè distarent : ne ad illorum
cœnas ac prandia tardiùs accederet,
equum sibi comparavit : qui, quoniàm
Becodianâ in scholâ [* 1], quam Parnassum
Parisiensem Ronsardus vocare solebat,
stabulabatur, Pegasus est appellatus ;
de quo carmen est SPESSEI
[6]. Le commencement de ce passage
contient une jolie pensée, savoir que
Montmaur, en consultant les augures,
n’attendait pas que des vautours ou
quelque autre espèce d’oiseaux se
présentassent, il n’était attentif qu’à
la fumée des cuisines. Il eût fallu
dire, conséquemment à cela [7]
qu’ayant voulu connaître les disciplines
augurales, il se borna à la
capnomance [8]. La raillerie de ces
messieurs est devenue un lieu commun
pour ceux qui veulent caractériser
le parasitisme. Ils disent qu’un
parasite, sortant de son logis sans savoir
encore où il dînera, conduit ses
pas dans les rues de Paris dans la direction
de la fumée des cuisines ; que
cette fumée est sa boussole et son
étoile polaire, etc.
- ↑ (*) Binetus in Vitâ Ronsardi.
- ↑ Dans les rem. (D) et (H).
- ↑ Histoire de la Vie et de la Mort du grand Mogor, pag. 25, 26, au Recueil d’Hadrien Valois.
- ↑ Conférez avec ceci ces mots d’Horace, epist.
I, vs. 152, lib. II :
Quin etiam lex
Pœnaque lata, malo quæ nollet carmine quemquan
Describi. - ↑ Menag. Miscell., pag. 7 et 8.
- ↑ Feramus, in Macrini Parasito-grammatici ἡμέρα ; init. apud Menagium, Miscellan., in libro adoptivo, pag. 7.
- ↑ Menagius, in Vitâ Mamurræ, pag. m. 20.
- ↑ C’est-à-dire dans l’endroit où M. Ménage donne la liste des arts et des sciences que Mamurra voulut savoir.
- ↑ C’est l’art de deviner par la fumée.