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BAUDOUIN.

ils lui en tirent la guerre si souvent dans leurs écrits, que personne n’en peut prétendre cause d’ignorance[1]. voyez le IIe. volume des Disputes de Voetius, à la page 780.

(B) Il fut appelé à Bourges, pour la profession en jurisprudence. ] Nous allons toucher un second défaut des écrivains qui parlent de lui : ils ne marquent presque jamais en quel temps il fut pourvu de telle ou de telle charge. M. Ménage, qui a évité ce défaut, observe qu’il fut professeur en droit à Bourges, depuis 1549 jusqu’en 1556 : (il fallait dire depuis 1548 jusqu’en 1555), et qu’il y reçut le bonnet de docteur de la main d’Éguinarius Baro[2]. La cérémonie de cette réception fut faite le 13 de mars 1549, comme M. Catherinot nous l’apprend[3]. Il ajoute, qu’en 1553, les gages de François Duaren montaient à 920 livres, ceux de notre Baudouin à 350, ceux de Hugues Doneau à 230. J’observe cela, afin de convaincre de mensonge Papyre Masson, qui a dit que les gages de Baudouin ne furent pas moindres que les gages de ses collègues. Accersitur à Biturigibus ad docendi munus suscipiendum futurus collega Baronis et Duareni jurisconsultorum, accepturusque de publico honorarium Quantum illis daretur[4] Je lui montre ailleurs[5] un autre mensonge. M. Catherinot remarque sous l’an 1549, que Balduin fut pendant un temps suspect d’hérésie, comme disciple de Jean Calvin à Genève, et commensat de Charles du Moulin à Paris. Il dit aussi qu’en 1556, Balduin écrivit contre Duaren sur le sujet des bénéfices, et que Duaren le nommait par mépris Balbin. Voyez, continue-t-il, son portrait chez Duaren, dans une lettre du 13 juin 1555. Je donne ailleurs[6] quelques extraits de cette lettre. Notez qu’il entretint commerce de lettres avec Calvin pendant son séjour à Bourges, et qu’il lui témoignait qu’au fond de l’âme il était bon protestant[7]. On lui reprocha d’avoir suborné à Bourges une riche veuve[8], et d‘avoir quitté cette académie sans dire adieu à son hôte[9]. Je ne rapporte ces choses qu’afin qu’on voie quelques circonstances de la profession que notre Baudouin exerça dans l’académie de Bourges. M. Ménage assure qu’il y fit en 1556[10] l’oraison funèbre d’Éguinarius Baro, dont il avait été ennemi, si l’on en croit Duaren[11]. Duarenus tantam juvenis (Balduini) gloriam non ferens, nunquàm se Balduino satis æquum præbuit[12]. Au reste, la date de sa vocation à la chaire de jurisprudence à Bourges nous fait connaître une méprise de M. Bullart. Il dit que cet habile homme était passé à Genève, pour apprendre de la bouche même de Calvin et de Bèze la raison qui les avait obligés à quitter l’église romaine[13]. Il reconnaît que ce voyage précéda le temps auquel Baudouin fut fait professeur à Bourges : il doit donc tomber d’accord que Baudouin le fit avant l’année 1549, et par conséquent lorsque Bèze n’était pas encore un sujet à consulter sur ces matières. Il est sûr, 1o. que Bèze était encore papiste, et à Paris, lorsque Baudouin prônait dans les compagnies les lettres de Calvin et de Bucer[14] ; 2o. que Baudouin s’était retiré de Genève avant que Bèze y allât[15]. Ceci nous fournit une forte preuve de la fausseté que Varillas a debitée dans ces paroles : Calvin, qui prétendait le pousser par les mêmes voies que Bèze s’était accrédité dans le parti, l’avait appelé à Genève, reçu dans sa maison, mis

  1. Voyez le livre que Théodore de Bèze fit contre lui.
  2. Ménage, Remarques sur la Vie de Pierre Ayrault, pag. 157.
  3. Catherinot, Calvinisme de Berri, pag. 4.
  4. Papyr. Masso, Elogior. part. II, pag. 257. Vous trouverez dans Bullart, Acad. des Sciences, tom. I, pag. 238, la même faute.
  5. Dans l’article Duaren.
  6. Dans la remarque (I) de l’article Duaren.
  7. Voyez la Réponse de Bèze à Baudouin, Oper., tom. II, pag. 213, 214.
  8. Beza, ibid., pag. 214.
  9. Idem, ibid., pag. 213.
  10. Il fallait dire 1550. Voyez l’article Duaren, remarque (E).
  11. Ménage, Remarques sur la Vie de Pierre Ayrault, pag. 157.
  12. Papyr. Masso, Elogior. part. II, pag. 257.
  13. Bullart. Académie des Sciences, tom. I, pag. 228. La même faute est dans le Théâtre de Ghilini, tom. II, pag. 83.
  14. Beza, Respons. ad Balduin., pag. 206. Oper., tom. II. Notez que Baudouin, dans sa IIIe. Réponse, folio 80 verso, dit que cela appartient à l’an 1546.
  15. Balduin., ibid., folio 83 verso.