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ARCHIMÉLUS. ARCHIROTA.

à qui l’imposteur de Viterbe a eu la hardiesse de supposer un petit livret. Voici ce qu’il y a dans Eusèbe, selon la version latine : Licet Archilochus vicesimam tertiam olympiadem..... supputet [1]. On prétend que cela veut dire qu’Archilochus a supputé de telle sorte les temps qu’il a mis Homère sous la 23e. olympiade. Mais Scaliger a montré que le grec d’Eusèbe ne signifie autre chose, sinon qu’il y a eu des auteurs qui ont fait fleurir Homère et Archilochus en même temps. Goropius Becanus avait déjà éclairci cela dans le grand et curieux ramas qu’il a fait sur Archilochus, afin de réfuter pleinement les fourberies d’Annius de Viterbe [2]. Voilà donc le prétendu chronologue Archilochus réduit à rien. Vossius eût mieux fait de suivre cette correction, que de mettre Archilochus entre les historiens grecs [3]. Il ajoute que Scaliger le place sous le règne de Darius, fils d’Hystaspes [4], sans en rapporter aucune preuve. Je n’ai pu trouver cela dans les notes de Scaliger, que Vossius cite ; et je ne crois pas que cela y soit. Vossius, dans un autre livre [5], ayant parlé de notre poëte Archilochus sous la 29e. olympiade, en promet un autre sous la 94e. ; mais quand on l’y va chercher, on n’y trouve qu’un Antilochus. Charles Étienne, et MM. Lloyd et Hofman nous ont donné un Archilochus poëte lacédémonien, florissant à Rome sous Tullus Hostilius, et un autre Archilochus fils de Nestor, et tué au siége de Troie par Memnon. Ce sont toutes chimères : ce dernier s’appelait Antilochus ; et il ne fallait qu’un peu d’attention pour se souvenir que la cour des premiers rois de Rome n’était pas un théâtre propre à des poëtes grecs. La plupart de ces dernières fautes se voient dans le Calepin.

  1. Euseb., in Chron., ad ann. 908.
  2. Gorop. Becanus, Origin. Antverp., lib. IV, ce qu’il dit là-dessus se trouve dans la Biblioth. Hispanica de Schotius, pag. 375 et suiv.
  3. Vossius, de Histor. Græcis, pag. 5.
  4. Il monta sur le trône l’an 3 de la 64e. olympiade. Vossius, de Hist. Græcis, pag. 6.
  5. Vossius, de Poëtis Græcis, pag. 14.

ARCHIMELUS, poëte grec, a fleuri au temps d’Hiéron roi de Syracuse (A) : cela paraît par le présent qu’il reçut de ce monarque. Il avait fait une épigramme à la louange d’un navire d’une grandeur prodigieuse, qu’Hiéron avait fait bâtir [a] : cette épigramme lui valut mille muids de blé, que ce prince lui fit porter au Pirée [b]. Voilà donc un poëte à ranger avec ceux qui en petit nombre ont trouvé des amiraux de Joyeuse [c].

  1. Voyez-en la Description dans Athénée, lib. V, pag. 206.
  2. Athen., pag. 209.
  3. L’amiral de ce nom donna une abbaye pour un sonnet. Balzac, Entret. VIII.

(A) Il a fleuri au temps d’Hiéron, roi de Syracuse. ] C’est-à-dire, environ l’an de Rome 520, et l’olympiade 136. Il y a de l’apparence qu’il demeurait à Athènes, puisqu’on fit porter au Pirée le blé dont on lui faisait présent. Je m’étonne que Vossius ait oublié un tel poëte : la récompense de son épigramme le rendait notable. Athénée nous a conservé les dix-huit vers qui furent si largement payés [1]. M. Catherinot n’a point rapporté fidèlement l’état de la récompense. Archimélus, dit-il [2], fut régalé par le roi Hiéron de six mille muids de blé, pour une épigramme de vingt vers sur son vaisseau.

  1. Athen., lib. V, pag. 209.
  2. Cather., Traité de la Marine, pag. 6.

ARCHIROTA (Alexandre) (A) abbé des Olivets [a], était de Naples. Il composa, entre autres livres, un Recueil des Actions des rois dont l’Écriture fait mention (B), et le dédia à la reine de Pologne, Bonne Sforce, qui demeurait alors à Bari. Elle lui donna en récompense une pension viagère de 300 écus par an. Il vécut cent vingt années [b]. M. Konig le fait fleurir en 1636, et lui attribue un Com-

  1. C’est une sorte de moines en Italie.
  2. Lancel. de Pérouse, à la page 987 du livre intitulé, Chi l’indovina è savio.