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de cette perfection d’inimitiés et de jalousies, si ce n’est privation de plaisir et de bien-être, destruction des récoltes et des revenus ; suite continuelle de crimes de lese humanité, et par conséquent, suite continuelle des maux qui sont les suites inévitables et physiquement nécessaires de tout délit tant privé que public ? La politique raisonnable, juste, bienfaisante, effaceroit donc du dictionnaire des peuples civilisés, ces mots absurdes et atroces de nations rivales, de nations naturellement ennemies ; elle effaceroit même ceux de nations indifférentes. En effet, le vrai droit des gens, qui n’est pas autre que la loi naturelle elle-même, et qui consiste précisément et uniquement à n’usurper la propriété, à ne violer la liberté de nul homme quelconque, nécessite évidemment la liberté pleine et absolue du commerce et son immunité ; car tout ce qui met la moindre gêne, la moindre exaction sur les échanges, est évidemment usurpation de propriété, violation de liberté. La liberté, l’immunité du commerce rendent intéressant pour tous les peuples de la terre le sort de chaque nation particuliere, le sort de chacune des classes qui la composent. Considérez-les sous ce point de vue, et vous sentirez que bien loin d’être un objet indifférent pour toutes les sociétés humaines, c’est au contraire un de ceux qui regle leur bien-être, que la perfection progressive, ou la dégradation continuelle de l’art social, de l’art productif et de l’art stérile dans chaque nation. Et pour vous en mieux convaincre, n’oubliez pas que les peuples mêmes qui ne paroissent pas communiquer immédiatement entre eux, ont néanmoins des relations médiates et de reflet en seconde ou troisieme ligne. Par exemple, le sauvage de l’Amérique septentrionale, qui chasse au fond des bois, ne paroît avoir aucun rapport avec le propriétaire ou le cultivateur d’un vignoble de Bourdeaux, ni avec un manufacturier de Lyon, ni avec un gentilhomme allemand ; cependant, l’Anglois qui commerce le castor pris dans cette chasse, fournit au gentilhomme allemand une coëffure plus commode et moins couteuse : enrichi par ce commerce, il achete le vin de Bourdeaux ; et le propriétaire du vignoble achete pour lui, pour sa femme, pour son ameublement, des soiries de Lyon. Après nous être ouvert les yeux par cet exemple particulier, donnons l’essor aux idées générales. Concevons