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et Hercule avaient vite fait de lui sauter au cou et de l’amener dans la cour, où l’on jouait au cheval à tour de rôle.

« Ils vont venir demain », pensa soudain le petit homme, et la perspective d’une longue journée de plaisir dissipa à demi le chagrin de l’enfant déçu.

En s’approchant de la voiture, le fermier dit à son frère : « Je t’aurais jamais reconnu, tu sais, j’ai beau te regarder, tu ne te ressembles plus ! »

— Oui, dit Antoine, je dois avoir terriblement vieilli. Mais toi, mon aîné, tu parais avoir dix ans de moins que moi. En te voyant, je t’ai reconnu tout de suite, va. Comment peut-on vieillir avec ce bon air qui vous réjouit le cœur, dit-il en humant avec force et en promenant son regard au loin. Et, tout en parlant, il montra, d’un geste large, l’étendue de la vaste plaine.

Le fermier garda le silence : il songeait avec bonheur que l’amour de la terre n’était pas encore éteint dans le cœur de son frère, et, sans rien approfondir, il ajouta en indiquant la voiture : montons.

On détacha Blanchette, qui piaffait depuis le départ du train. Installés tous les quatre dans le phaéton, et la valise bien assujettie à l’arrière, on partit bon train pour la maison natale.