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1621. novembre.

mes gens me dirent que de la cavalerie passoit la riviere ; je m’imaginay aussy tost que c’estoit celle de monsieur le connestable, et ne fus pas trompé. Je me fis aborder en l’estat que j’estois et trouvay Nesmont sur la rive, quy faisoit embarquer ses bagages pour aller coucher avec la compagnie a Puch de Gontaut[1] qui est a demie lieue de Marmande. Cela me mit en tres grande peine, tout perdu de mal comme j’estois, et preveus celuy quy leur arriveroit. J’envoyay querir Nesmont et Vaillac, et leur demanday quy leur avoit donné ce departement : ils me dirent que le soir auparavant Mr le mareschal de Roquelaure leur avoit envoyé, et leur avoit fort recommandé de desloger avant que le roy arrivat devant Monheurt. Je le creus facilement ; car le roy n’eut jammais consenty qu’ils en fussent partis pour aller a Puch se jetter au millieu des ennemis dans un païs huguenot. Je leur dis lors que je les priois de superseder jusques a ce que le roy eut sceu l’inconvenient qu’il y avoit de faire passer une seule compagnie de gensdarmes dans un païs du tout ennemy, sans l’accompagner d’infanterie ou la loger dans une ville fermée ; que j’envoyerois un gentilhomme avec celuy qu’ils envoyeroint au roy, et que peut estre le roy leur donneroit pour garnison la ville de Marmande[2], quy leur seroit un

  1. Ici et dans la suite du récit il faut lire : Gontaud, et non : Puch-de-Gontaud. Ce fut en effet à Gontaud, petite ville située du côté droit de la Garonne, non loin de Marmande, qu’eut lieu la surprise dont il est fait mention plus loin.
  2. Marmande, chef-lieu d’arrondissement du département de