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journal de ma vie.

desja entré dedans[1], hormis quelques paresseux qu’il tailla en pieces.

Peu apres Modene quy estoit avesques la cavalerie quy avoit laissé passer le secours sur ce qu’il les avoit conseillés de s’en aller par un lieu[2] ou les ennemis ne venoint pas, s’en vint me trouver et me dire que par le plus grand malheur du monde, tout le secours estoit entré sans que l’on l’ait rencontré ; qu’il avoit tiré deux coups de pistollets pour avertir qu’ils passoint, et que personne n’estoit venu a luy ; qu’il les avoit menés jusques proche de la ville et les avoit comptés ; qu’ils estoint quinse cens au moins, et plusieurs autres contes et fables selon sa coustume. Je me mis en colere et luy dis qu’il n’estoit rien de tout ce qu’il me disoit, et qu’il venoit apres le coup nous en faire accroire, et pour preuve je luy montray plus de deux cens hommes morts en cent pas de place, et cent autres en peu d’espace de là. Il me loua grandement, et puis alla a toute bride dire a monsieur le connestable que n’ayant peu induire la cavalerie a deffaire le secours, qu’il m’estoit venu montrer par ou ils passoint pour me les faire attaquer, et en me louant mediocrement luy dit que luy avoit fait des merveilles, dont il eut le lendemain la huée quand on sceut ce qu’il avoit fait.

Vers la pointe du jour monsieur le connestable avec Mrs de Guyse et de Montmorency, arriverent. Je luy

  1. « Six cent trente hommes sous neuf drapeaux » (les mémoires du duc de Rohan disent sept cents), entrèrent dans la ville.
  2. Il y avait : de ne s’en aller pas en un lieu.