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journal de ma vie.

nuit, Mr de Chaunes la seconde, et moy la troisieme. Mais une heure devant que Mr le mareschal de Pralain y deut aller, il receut une mousquetade quy luy entama la peau du ventre en effleurant seulement, de sorte qu’il fallut que j’y allasse en sa place.

Le vendredy 17me Mrs du Maine et de Chomberg nous envoyerent prier de nous trouver au bout du pont du Tar quy estoit entre l’attaque de Mr du Maine et la nostre : Mrs de Chaunes, de Pralain et moy, nous y trouvasmes, et Mr du Maine nous pria de vouloir favoriser une nouvelle attaque qu’il vouloit faire le lendemain a Ville Bourbon, tant de nostre canon que par quelque diversion, ce que messieurs les mareschaux luy promirent.

Mr de Guyse me voulut desbaucher pour aller disner avesques luy cheux Mr du Maine[1] ; mais parce que Mr le mareschal Desdiguieres nous avoit donné rendés-vous au carero[2] de Ruffe, je m’en excusay, et luy dis qu’il se prit garde de Mr du Maine quy n’avoit point plus grand plaisir que de faire tirer sur luy, ou sur ceux qu’il menoit pour voir ses travaux, et qu’il s’eschaudoit pour brusler autruy. Mais a mon grand regret ma prophetie fut en quelque sorte veritable ; car l’apres disner, comme il leur montroit ses travaux, une haquebusade luy donna dans l’œil, quy avoit pre-

  1. Le duc de Guise était arrivé au camp le 7 septembre avec un grand nombre de gentilshommes de son gouvernement de Provence. Il repartit peu après la mort du duc de Mayenne.
  2. La carrière. Le carero de Ruffe était une position occupée par les troupes royales. L’Histoire de Montauban appelle cet endroit la carrière de Rous.