Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 2.djvu/28

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
24
journal de ma vie.

avoint respondu : mais lors qu’ils virent Mr de Pralain, ils luy manderent qu’ils estoint pres de sortir, de revenir chascun en sa maison, et de fournir des vivres et ustensiles ce qu’il ordonneroit, ce que Mr de Pralain accepta, et leur manda qu’ils ne sortissent point jusques a ce que chascun fut logé ; et a l’heure mesme les fourriers de nostre cavalerie legere nous ayans porté l’allarme de l’armée des ennemis quy estoint sur nos bras, nous nous avançames avesques les trouppes fait a fait[1] qu’elles arrivoint, et comme monsieur le mareschal vint a Granges, trouvant cette contestation entre ce provost et ces païsans renouvellée, sans s’enquerir de ce que Mr de Pralain leur avoit ordonné, fit tirer trois coups de canon a cette eglise, et les païsans s’estans rendus a sa misericorde, commanda à ce mesme provost d’en pendre quattre des principaux, ce qu’il executa avant nostre retour, que nous luy rapportames que les ennemis estoint a pres de deux lieues derriere nous et que nostre teste estoit forte de telle sorte que les ennemis ne pouvoint rien entreprendre a cause d’un profond ruisseau quy nous separoit ; et bien qu’ils se fussent avancés a demie lieue proche de Granges avesques leur cavalerie, ils s’estoint neammoins retirés a l’entrée de la nuit lors que ces trois coups de canon avoint tiré, quy leur firent croyre que nostre armée marchoit pour les aller attaquer.

Ils se mirent donc en battaille, et y coucherent toute la nuit, et le lendemain attendirent jusques a neuf heures que nous les vinssions attaquer.

Mais nous partimes au jour, dudit Granges, le ven-

  1. Fait à fait, à mesure.