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1620. octobre.

moy : cela me mettoit en peine ; car Mr de Luynes s’en faschoit et s’en prenoit a moy.

Le troisieme jour que le roy sejourna a Blayes, quy estoit le 29me d’octobre[1], je vins le soir au chasteau prendre le mot, et trouvant que le roy estoit a ses affaires[2], j’y entray comme j’avois de coustume. Le roy ne me dit mot sinon que peu apres s’estant levé, il me commanda de faire acheminer les Suisses vers Saintes, et que sa garde fut le lendemain au lieu ou il alloit coucher, et puis m’estant approché l’oreille pour luy demander le mot, il me dit : « Saint-Michel », puis adjouta : « Bassompierre, mon amy, ne t’ennuye point et ne fais semblant de rien. » Je ne luy respondis aucune chose, de peur que quelqu’un ne s’en apperceut ; mais je ne fus pas marry que la source de la bonté du roy ne fut pas tarie pour moy.

Sur cela je sortis pour faire prendre les armes aux Suisses, parce que le roy devoit bientost aller cheux Mr de Luxembourg pour y soupper. Comme j’estois en cette place devant le chasteau, arriverent Mrs du Maine et d’Espernon que le roy avoit envoyé querir, quy appercevant les gardes sur leurs armes, creurent que l’on les alloit arrester. Mr d’Espernon me [prit par la main et me][3] dit : « Parlés moy en cet ancien [et parfait][4] amy que vous m’estes depuis longtemps :

  1. Le roi partit de Blaye le 29 pour aller coucher à Mirambeau : le fait que raconte Bassompierre se passa donc plutôt le 28.
  2. On peut voir dans le Journal d’Hérouard ce que signifie cette expression.
  3. Inédit.
  4. Inédit.