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journal de ma vie

catholique ; et ce fut a condition qu’apres que nous aurions esté quelque temps a la court du roy, et en Normandie (ou ma mere luy fit croire que nous avions quelques affaires), que nous passerions de la en la court d’Espaigne, et que nous ne nous embarquerions en l’une ny en l’autre jusques apres nostre retour de toutes les deux : il nous fit promettre de plus, que quand nous voudrions faire ce choix, que nous suyvrions l’advis quy nous seroit donné sur ce sujet par nos principaux parens et amis.

Octobre. — Nous partimes donc de Harouel, mon frere et moy, avec ma mere et mes deux soeurs, en fort belesquipage, le lendemain de la Saint-François, le 5e jour d’octobre de la mesme année 1598 ; et passans par Toul, Ligny, Saint-Disier, Vittri, Fere Champenoise, Provins, et Nangis, nous arrivasmes a Paris le 12e du mesme mois d’octobre, et vinsmes loger a l’hostel de Montlor, en la rue de Saint-Thomas du Louvre.

Le roy estoit pour lors a Monceaux[1] avesques une grande maladie, de laquelle il fut en grand danger. Il n’y avoit pres de luy, de la connaissance de ma mere, que Mr de Schomberg[2], pere du maresehal, auquel elle escrivit pour sçavoir quand nous pourrions faire la reverence a Sa Majesté ; il luy respondit qu’il n’estoit pas a propos d’y penser seulement, en l’estat ou

  1. Le château de Monceaux, situé à deux lieues de Meaux, avait été donné, en 1595, par Henri IV à Gabrielle d’Estrées.
  2. Gaspard de Schomberg, gentilhomme de Misnie, fils de Wolfgang de Schomberg et d’Anne de Minkwitz, fut colonel de reîtres au service de France pendant les guerres de religion. Il mourut le 17 mars 1599.