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journal de ma vie

On avisa lors de licencier l’armée quy estoit sur le point d’entrer en Italie, a laquelle on donna un mois de paye aux chefs pour distribuer a leurs soldats, non encores tout a fait mis sur pié ; et quant a celle quy estoit en Champaigne, on en reserva dix mille hommes de pié, savoir sept mille François et trois mille Suisses, pour envoyer a Julliers, et on licentia le reste.

En ce mesme temps le marquis Botty, quy traittoit l’accommodement, eut pouvoir d’offrir a la reine que l’on mettroit entre mes mains, en depost, le duché de Juliers, dont je ferois serment a l’empereur, [au roy][1], au roy d’Espaigne, a celuy d’Angleterre, et aux Estats ; et que je ne m’en dessaisirois point qu’avesques leur general consentement, et apres que l’on auroit decidé a quy il devroit appartenir. La reine-mere fut tres ayse qu’une sy noble chose luy fut arrivée au commencement de sa regence, qu’un sien particulier serviteur (car, apres la mort du roy, elle me retint avec 4000 escus de pension), fut choisy pour luy confier le depost, et en voulut avoir le consentement du roy d’Angleterre et des Estats de Hollande : celuy la y consentit volontiers ; mais les Hollandois ne le voulurent faire, et priverent ma bonne fortune d’un tel avantage quy m’estoit sy important.

Toutes les villes et provinces du royaume vindrent a l’envy apres la mort du roy, par leurs deputés, saluer le roy, et reconnoistre la reine regente.

  1. Inédit.