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journal de ma vie.

propos aussy, luy respondis-je, pour vous demander quelque chose ; mais c’est en payant : assavoir cent paires d’armes de vostre arsenac, quy nous manquent, et que nous ne pouvons avoir, a quelque prix que nous en veuillons donner. Ce n’est pas pour ma compagnie ; car elle est complette et armée comme il faut : mais Mr de Varennes en a besoin de vingt-cinq, Mr des Bordes de vingt-cinq, et le comte de Charlus[1] de cinquante. » Il me respondit lors : « Bassompierre, je vous les feray donner : mais n’en dittes mot ; car tout le monde m’en demanderoit, et je desgarnirois mon arsenac. Venés y cette apres disnée, car j’iray voir Mr de Suilly, et je luy commanderay de vous les faire delivrer. » Je luy dis : « Sire, je donneray a l’heure mesme l’argent qu’elles valent a Mr de Suilly, affin qu’il les remplace. » Et il me respondit la fin d’une chanson quy dit :

Que je n’offre a personne,
Mais a vous je les donne.


Lors je luy baisay la main, et me retiray, comme il entra dans sa chambre, pour m’en aller disner a l’hostel de Chalons avesques Mr de Guyse et Mr de Roquelaure.

Apres disner je vins passer cheux Descures[2], a la

  1. Jean-Louis de Lévis, comte de Charlus, fils de Claude de Lévis, baron de Charlus, et de Jeanne de Maumont, mourut assassiné en 1611.
  2. Pierre Fougeu, seigneur d’Escures. La charge de maréchal général des logis des camps et armées du roi fut longtemps héréditaire dans la famille des Fougeu d’Escures et des Fourneaux.