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journal de ma vie.

la lignée quy en proviendra, quy est douteuse aux cousins germains ; et semble que Dieu ne benisse pas de sy proches alliances, en les privant souvent d’enfans, comme il se voit de celle de Mr le duc de Bavieres et de madame vostre sœur quy devoint, selon le jugement humain, avoir une belle et nombreuse lignée, estans tous deux sy bien faits et en la fleur de leur eage ; neammoins, depuis quinse ans qu’ils sont mariés, ils n’ont pas eu seulement le doute d’en avoir : et quand bien Vostre Altesse donneroit a monsieur son frere sa fille aynée pour son fils ayné, elle donneroit la seconde a quelque prince estranger, a quy tomberoit vostre duché sy l’aynée n’avoit point d’enfans de monsieur vostre neveu, quy seroit la mesme chose, mais bien moins avantageuse, que sy elle l’eut mariée avec monsieur le dauphin, quy n’aura pas moins de volonté que de puissance d’agrandir un jour son oncle et ses cousins germains. »

« Voyla, Monsieur (luy dis-je), les divers interets et la consequence d’iceux, que j’ay voulu representer a Vostre Altesse, avant que de luy dire les conseils qu’elle a à prendre la dessus, et que je luy puis donner sans prejudice de manquer au devoir auquel la personne que je represente maintenant m’oblige. Maintenant je luy estalleray toutes les responses qu’elle peut faire ; et puis elle mesme les ayant toutes meurement considerées, choisira celle qu’elle voudra faire au roy, laquelle je luy porteray fidellement, et sans luy rien cacher ny desguiser. »

« Elle peut donc, premierement, respondre au roy que les interets de la maison de Lorraine, et le desir de perpetuer sa succession et ses estats en sa mesme