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1609. juillet.

m’en irois, s’il le trouvoit bon, me promener pour quinse jours en Allemaigne, affin que, sy a mon retour, on me voyoit plus assidu a l’entretenir, l’on jugeat plustost que ce fut pour les affaires d’Allemaigne que pour celles de France que je luy parlasse. Il trouva mon dessein fort bon, et me dit qu’il avoit desja mesmes choisy celuy auquel il vouloit confier cette affaire, et de quy il desiroit prendre le conseil et l’avis, quy estoit mon voysin, le sieur Bouvet, president de Lorraine, et qu’apres luy avoir parlé, des aujourdhuy il luy commanderoit de me voir, et de conferer avec moy, et qu’il me respondoit de son silence et secret. Je luy rendis tres humbles graces, et approuvay son election.

Il me demanda la dessus a quel dessein le roy faisoit approcher de la Lorraine de sy grandes forces. Je luy asseuray que c’estoit sur le sujet de la mort de son beau frere le duc de Cleves[1], et que le roy apprehendoit que la maison d’Austriche se voulut approprier ses estats, ce qu’il ne vouloit souffrir en aucune façon, luy estant tres important de ne la laisser si fort aggrandir, mesmement[2] en son voysinage.

Comme j’achevois ce discours, le president Bouvet arriva, avesques lequel je le laissay pour m’aller preparer de partir pour Allemaigne, ou j’avois aussy affaire de la part du roy avec le marquis de Dour-

  1. Antoinette de Lorraine, sœur du duc, avait épousé, en 1598, Jean Guillaume, duc de Clèves.
  2. Particulièrement.