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payement ; et leur dit que ces trouppes hongroises estoint sans courage, ausquelles il ne donneroit jammais employ ny execution a faire : ce que ces colonels rapporterent a leurs gens, lesquels revindrent le lendemain samedi 12e octobre[1], dire de la part des Hongrois au general qu’aucune lascheté ny poltronnerie n’avoit empesché les Hongrois d’assaillir l’isle, mais bien le mespris qu’il avoit fait d’eux, de n’avoir voulu hasarder cinquante piquiers lantsquenets pour les soustenir ; et que, pour preuve que ce n’estoit point la crainte quy avoit destourné leur dessein, ils offroint d’aller au dessous de nostre camp passer en chayque le Danube, et faire un fort sur l’autre rive du costé des ennemis, en la plaine quy est entre Bude et leur camp, en laquelle ils faisoint paitre leurs chameaux au nombre d’environ dix mille.

Le Rosworm quy connoissoit de quelle importance il estoit de construire un fort entre Bude et le camp des ennemis, quy les eut empeschés d’envittailler Bude, et aussy voulant faire donner sur les doigts des Hongrois quy n’avoint pas voulu descendre a l’isle, pensa qu’il feroit infailliblement l’un ou l’autre. C’est pourquoy il loua hautement la genereuse resolution des Hongrois ; de laquelle il donnoit l’honneur aux colonels, qu’il disoit leur avoir persuadé, et a l’heure mesme leur fit fournir des chayques, des outils, et un ingenieur, pour tracer un fort sur le bord de l’autre rive, ou nos chayques alloint quelquefois prendre terre du costé des ennemis, et enlevoint toujours quelque cha-

  1. Le samedi était le 11 octobre.