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et bibliographique.

lorsque le roi intervint : le tendre monarque avait vu Mlle  de Montmorency, et il avait conçu pour elle une folle passion ; il aimait mieux laisser tomber la menace d’une infortune conjugale sur son parent que sur son ami, et il priait Bassompierre de renoncer en faveur du prince de Condé à la perspective de cette belle alliance. Bassompierre déféra au désir du roi, non sans regret, car il aimait Mlle  de Montmorency, toutefois « d’un amour réglé de mariage », ce qui lui permit de se consoler avec d’autres amours que ne tempérait pas la même règle.

Le roi, comme pour dédommager Bassompierre, lui confia bientôt une mission secrète et importante : il le chargea de faire au duc de Lorraine des ouvertures relatives à un projet de mariage entre sa fille et le dauphin de France. Le jeune ambassadeur, moitié Français et moitié Lorrain, sut se placer à tous les points de vue et présenter au duc tous les arguments qui pouvaient le décider. Le caractère irrésolu de ce prince l’empêcha de donner une réponse positive. Que de maux eussent été épargnés à la Lorraine, si sa réunion à la France se fût accomplie par cette voie pacifique, au lieu d’être achetée par de longues guerres ! Mais les grandes pensées d’Henri IV ne devaient pas voir leur accomplissement, et après le coup fatal qui l’enleva à la France, le souci des intérêts généraux fit place aux intrigues et aux ambitions personnelles : les protestants, ne se sentant plus ni suffisamment contenus ni suffisamment protégés, commencèrent à remuer, et tout annonça que la guerre civile éclaterait bientôt sur la France. Une première prise d’armes des princes et des grands en 1614 fut pour Bassompierre l’occasion d’une haute promotion : il obtint les provisions de la charge de colonel général des Suisses, rachetée par lui au duc de Rohan. Un second soulèvement, en 1615, donna lieu à une campagne à laquelle il prit part, mais qui fut conduite avec une grande mollesse : les généraux du roi semblaient craindre de poursuivre trop vivement leurs adversaires et