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1600. aout.

affin de forcer cette maison platte quy leur incommodait sy fort leur logement. Allors Mr de Crequy, quy estoit piqué de ce que les gardes ne l’avoint pas attendu pour donner ensemble a leur gauche a l’investissement, offrit à Mr Desdiguieres de la prendre sans canon, quy le prit au mot ; et l’apres disnée Mr Desdiguieres s’en vint de l’autre costé de l’Isere, vis a vis de la dite maison, pour en voir l’esbattement. Un petardier, nommé Bourquet, attacha un petard a la porte, quy fit plus de bruit que de mal ; mais il y avoit une grange tenante a la maison, que l’on sappa, et puis on y mit le feu, quy les contraignit de se rendre a misericorde : et Mr de Crequy les amena tous liés a Mr Desdiguieres, quy puis apres alla par en haut luy sixieme (dont j’estois l’un), reconnestre le lieu ou il logeroit sa batterie ; et estant sur le haut, un des capitaines du regiment de Crequy, quy estoit un de ces six, nommé la Couronne, parlant avesques moy, receut une mousquetade de la ville, quy luy rompit la cuisse. Mr Desdiguieres nous montra ou il feroit sa batterie, que nous tenions un lieu inaccessible pour le canon ; mais il nous dit : « Demain a dix heures mes deux canons seront montés, sy je puis gaigner ce soir quarante escus à Mr de Bassompierre, pour en donner vingt aux Suisses, et vingt aux François quy la monteront. » Ce qu’il fit, ayant premierement fait mener ses canons, munitions, gabions, et plate-formes, au pied de la montagne, sy droitte qu’a peine un homme y pouvoit monter a pied, et fit creuser des loges pour tenir ceux quy serviroint a guinder les canons ; quy estoint comme des marches ou ils se pouvoint tenir, et mit, en montant, cin-