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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

sonne doit avoir aimé. J’ai fait mes huit jours et je suis libre jusqu’à nouvel ordre…

Remittuntur ei peccata multa quare dilexit multum.

Dulciores sunt lacrymæ orantium quam gaudia theatrorum.

(Augustin.)


Florence. — Mardi, 8 mai. — Voulez-vous savoir la vérité ? eh bien, mais souvenez-vous bien de ce que je vais vous dire : Je n’aime personne et je n’aimerai jamais qu’une personne qui caressera agréablement mon amour-propre… ma vanité.

Quand on se sait aimé, on agit pour l’autre et alors on n’a pas honte ; au contraire, on se sent héroïque.

Je sais bien que je n’irai rien demander pour moi, mais pour une autre je ferais cent bassesses, car ce sont des bassesses qui élèvent.

C’est toujours pour vous prouver que les plus belles actions se font par égoïsme… Demander pour moi serait sublime, parce qu’il m’en coûterait… Oh ! rien que d’y songer, l’horreur ! Mais pour un autre, on se fait plaisir et on a l’air de l’abnégation, du dévouement, de la charité en personne.

Et on croit soi-même à son mérite dans ce moment-là. On croit naïvement qu’on est véritablement charitable, dévouée, sublime !


Vendredi 11 mai. — Ai-je dit que Gordigiani a été chez nous, m’a encouragée, m’a promis un avenir